Malgré un contexte favorable pour les finances publiques de la province, la santé économique du Québec demeure précaire selon la plus récente édition de Productivité et prospérité au Québec – Bilan, produit annuellement par le Centre sur la productivité et la prospérité – Fondation Walter J. Somers.

« D’abord, le niveau de vie au Québec demeure particulièrement faible, constate Robert Gagné, directeur du Centre. De plus, la croissance économique enregistrée au cours des dernières années s’est avérée insuffisante pour permettre au Québec de se détacher du bas du classement. Résultat : la Corée du Sud, qui occupe présentement le bas du classement, aura tôt fait de rattraper le Québec si la tendance se maintient ».

Un retard dont on doit se préoccuper

Selon les auteurs du rapport, on ne doit pas sous-estimer les conséquences de ce retard économique. « Le niveau de vie est avant tout une mesure de la capacité de l’économie à générer de la richesse, et non une mesure de la qualité de vie de sorte qu’on peut facilement être tenté de minimiser les conséquences du retard sur le quotidien des Québécois, affirme Robert Gagné. Or, les Québécois sont directement touchés par la faible prospérité économique du Québec. L’exemple le plus éloquent est celui du revenu disponible. En conséquence d’une croissance économique particulièrement faible au cours des 34 dernières années, la province se classe désormais bonne dernière en matière de revenu disponible. C’est donc dire qu’en moyenne les Québécois disposent de moins d’argent pour consommer ou épargner que les habitants des autres provinces canadiennes ».

La question du coût de la vie

Les auteurs apportent toutefois un bémol à ce constat. Puisque le revenu disponible ne tient pas compte des différences de prix qui séparent les provinces, la comparaison des revenus disponibles ne reflète pas nécessairement la véritable capacité des ménages à dépenser et à épargner.

Pour cette raison, les auteurs ont construit un indice qui mesure les différences dans le coût de la vie au Canada. Une fois les données de revenu disponible ajustées, les constats sont différents. Le Québec devance alors les provinces maritimes, et se rapproche de l’Ontario. Autrement dit, la capacité des ménages québécois à consommer et à épargner est plus élevée que ne le laissent paraître les données brutes.

« Si l’ajustement du coût de la vie tend à favoriser le Québec, on doit toutefois être conscient que cet avantage est appelé à disparaître, déplore Robert Gagné. Exception faite de la Saskatchewan, l’avantage détenu par le Québec au chapitre du coût de la vie s’est effrité depuis 2002. C’est donc dire que les prix ont progressé plus rapidement au Québec que dans les autres provinces canadiennes. Au rythme où vont les choses, le coût de la vie au Québec sera bientôt à parité avec celui de l’Ontario ».

Les solutions passeront inévitablement par la productivité

Si le Québec souhaite appuyer la croissance de son économie, il devra inévitablement tabler sur des gains de productivité. « À long terme, la productivité du travail est la principale, sinon la seule source de croissance économique, indique Robert Gagné. On doit ici savoir que la vaste majorité de la croissance économique enregistrée au Canada et à l’OCDE depuis le début des années 80 provient des gains de productivité réalisés. S’il souhaite accroître sa prospérité, le Québec n’échappera pas à cette règle ».

Selon les auteurs, la structure de l’activité économique au Québec aurait toutefois joué en défaveur de la province dans les années 90. «  À cette époque, une proportion non-négligeable du retard de productivité observé entre le Québec et l’Ontario s’expliquait par une répartition différente de l’activité économique. Autrement dit, la productivité du Québec était faible parce que l’activité économique se concentrait dans des industries où la productivité est généralement moins élevée ».

La situation s’est depuis inversée. Actuellement, la structure de l’activité économique est similaire à celle de l’Ontario de sorte que si le Québec accuse encore un retard, c’est parce que les entreprises sont simplement moins productives. « Ce qui est encourageant, c’est qu’aucune entrave structurelle n’empêche désormais le Québec d’améliorer sa performance en matière de productivité », conclut le Directeur.


Pour en savoir davantage : Deslauriers, Jonathan, Robert Gagné et Jonathan Paré, Productivité et prospérité au Québec – Bilan 2016, Centre sur la productivité et la prospérité (CPP) – Fondation Walter J. Somers, HEC Montréal, avril 2017