Alors que le développement des nouvelles infrastructures de transport collectif au Québec n’a visiblement pas obtenu le consensus espéré, la situation ne serait pas en voie de s’améliorer si on se fie au plus récent rapport du Centre sur la productivité et la prospérité – Fondation Walter J. Somers. « À la base, l’efficacité du processus de développement des infrastructures en transport en commun est minée par des enjeux de gouvernance, explique Jacques Roy, professeur titulaire au département de gestion des opérations et de la logistique à HEC Montréal et auteur de l’étude. Que ce soit à Montréal, Québec ou Gatineau, les projets en cours n’ont pas toujours été en phase avec les principes de gouvernance qui devraient normalement encadrer leur conduite, avec les conséquences qu’on connait aujourd’hui ».

Dans un rapport publié aujourd’hui, le chercheur met en perspective les difficultés rencontrées dans la planification et le développement des projets de transport collectif au Québec. Sans surprise, les enjeux s’avèrent plus nombreux et surtout plus importants dans la région métropolitaine de Montréal. « En principe, la structure de gouvernance mise en place dans la région de Montréal était adéquate mais dans les faits, l’Autorité régionale de transport métropolitain (ARTM) s’est avérée incapable d’assumer les responsabilités stratégiques qui lui avaient été confiées, conclut Jacques Roy. Résultat : la mécanique a déraillé ».

Le chercheur rappelle notamment que l’ARTM a été rappelée à l’ordre par le ministère des Transports (MTQ) à l’automne 2021 en raison de manquements dans la planification et la coordination des projets sur son territoire. L’année suivante, un rapport accablant du MTQ décrivait les relations tendues entretenues par l’ARTM tout en dénonçant son entêtement à ne pas reconnaître les compétences des sociétés de transports affiliées et son incapacité à assumer ses responsabilités.

Indépendance et crédibilité

Parmi les pistes de solutions proposées pour améliorer la gestion et la planification des infrastructures de transports dans la région métropolitaine de Montréal, il y a certes la nécessité de proposer un cadre financier suffisant et durable et le défi d’intégrer le REM dans le réseau de transport collectif. Le chercheur propose également de revoir le processus de nomination des dirigeants de l’ARTM. « Si le gouvernement du Québec souhaite maintenir l’ARTM et lui donner les moyens de jouer effectivement son rôle, on doit parvenir à lui redonner une certaine crédibilité, estime Jacques Roy. Pour y parvenir rapidement, on devra faire en sorte que la direction de l’organisation soit assurée par des dirigeants crédibles aux yeux des sociétés de transports, ce qui implique des changements, notamment dans la sélection du conseil d’administration ».

Rappelons que le MTQ a dénoncé le « manque d’experts en réseau de transport collectif au sein du conseil d’administration » dans un rapport publié plus tôt cette année, une critique relayée par plusieurs des parties prenantes aux débats. « Ce sont des milliards de dollars en fonds publics qui sont ici en jeu et il y a urgence d’agir pour améliorer l’offre et l’efficacité des réseaux de transports en commun. On n’a clairement pas le luxe de se priver de l’expertise requise. Au contraire, on devra chercher à la renforcer » conclut le chercheur.


Pour en savoir davantage : Roy, Jacques, La gouvernance du transport collectif au Québec : Enjeux et pistes de solution, Centre sur la productivité et la prospérité (CPP) – Fondation Walter J. Somers, HEC Montréal, Décembre 2022