Alors que la baisse de la rentabilité de Loto-Québec soit généralement justifiée par une diminution de la demande et par les efforts déployés pour assurer une commercialisation responsable des jeux de hasard, une analyse en profondeur de la performance de la société d’État met en lumière un problème de productivité. Voilà le principal constat tiré d’une récente étude réalisée par le Centre sur la productivité et la prospérité – Fondation Walter J. Somers de HEC Montréal (CPP).

« En parcourant les états financiers de Loto-Québec, il apparaît que la capacité de la société d’État à dégager des bénéfices a effectivement été fragilisée par un contexte difficile, confirme Robert Gagné, directeur du CPP. Mais, en poussant l’analyse au-delà des données brutes présentées dans les rapports annuels, on constate que Loto-Québec n’a pas été en mesure d’atténuer la pression sur sa rentabilité par des gains de productivité. Désormais, la société dégage un bénéfice net réel largement inférieur à celui affiché au milieu des années 2000, ce qui représente un important manque à gagner pour le gouvernement du Québec. »

Peu d’exigences, peu de résultats

Ainsi, sans pour autant minimiser l’importance de la lutte contre la dépendance au jeu, l’étude conclut que Loto-Québec aurait pu produire de meilleurs résultats si le gouvernement l’avait contraint à respecter des cibles précises en matière de productivité. « Bien que la productivité de la Loto-Québec ait commencé à décliner dès le début des années 2000, il aura fallu attendre jusqu’en 2010 pour que le gouvernement du Québec intervienne », précise le directeur.
En limitant ses exigences à des cibles comptables – un meilleur contrôle des salaires, une réduction des dépenses d’administration, de publicité et de formation – le gouvernement n’a toutefois eu qu’une incidence limitée sur la productivité de Loto-Québec. Il aura fallu attendre le plan stratégie 2014-2017 pour que la société d’État renverse la tendance en s’appuyant sur une « offre de divertissement novatrice et compétitive » tout en assurant « une gestion efficace et efficiente de ses ressources ». Loto-Québec est alors parvenue à accroître sa productivité de 15 % en moins de deux ans.

Une exception?

En analysant la performance de la Société des loteries et des jeux de l’Ontario (SLJO), les auteurs ont constaté que le cas de Loto-Québec n’était pas isolé. En l’absence d’exigences claires de la part du gouvernement de l’Ontario, la SLJO n’est pas non plus parvenu à s’ajuster adéquatement au resserrement des conditions de son marché au cours des années 2 000 et sa rentabilité a chuté. En dépit des efforts déployés et malgré une réduction de 15 % de ses effectifs, il aura fallu que la société amorce une phase de modernisation axée vers le client en 2012 pour qu’elle renoue avec la croissance.

Recommandation

À la lumière de cette étude, une évidence s’impose : le gouvernement du Québec doit revoir ses exigences à l’égard de Loto-Québec s’il souhaite assurer une commercialisation responsable des jeux de hasard tout en maximisant ses revenus. « Ainsi, plutôt que de se limiter à des objectifs financiers et à des formulations vagues en matière de productivité, le gouvernement du Québec doit lui fixer des objectifs clairs et s’assurer que la société d’État les atteigne sans quoi, les revenus dégagés de la commercialisation des jeux de hasard seront à nouveau appelés à diminuer », conclut Robert Gagné.


Pour en apprendre davantage : Deslauriers, Jonathan, Robert Gagné, Claude Laurin et Jonathan Paré, Productivité du secteur public du Québec: Loto-Québec, Centre sur la productivité et la prospérité (CPP) – Fondation Walter J. Somers, HEC Montréal, décembre 2017.